Synthèse du rapport d’évaluation – Pass’Sport pour l’Emploi (2024–2025)
Jeudi 27 novembre 2025 a eu lieu la restitution des travaux d’évaluation de notre module de formation « Sport & Performance », dans la salle des fêtes de la mairie du 20ème arrondissement de Paris. Financée dans le cadre de l’Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI) « Consolidation des initiatives d’ampleur en socio-sport » de l’Agence Nationale du Sport (ANS) et du Pôle Ressources National Sport-Innovations (PRNS-I), cette démarche évaluative a été pilotée par l’évaluateur indépendant Fabrice Rey. 55 personnes étaient réunies pour l’occasion : nos partenaires et financeurs – entreprises, services de l’Etat, collectivités, réseau pour l’emploi, associations et laboratoires de recherche – ont témoigné de leur engagement à nos côtés et contribué à créer un véritable espace de dialogue, d’écoute et de co-construction, aux côtés de notre équipe et de nos fondateurs Thierry Marx et Benoit Campargue.
Cette évaluation, menée entre janvier 2025 et novembre 2025 a porté sur un échantillon de 11 sessions de formation menant à 6 métiers différents et ayant eu lieu entre mars 2024 et septembre 2025. Elle avait pour objectif de décortiquer un cas pratique d’utilisation du socio-sport dans la formation professionnelle, d’en mesurer l’impact et d’identifier dans quelle mesure le module « Sport & Performance » permet d’évaluer, valoriser et développer les compétences transversales de nos stagiaires afin de les remobiliser et/ou de les préparer à l’emploi. Cette évaluation permet à l’association de contribuer à la production de connaissances et ainsi alimenter le plaidoyer pour le financement pérenne du sociosport, mais également son intégration plus structurée dans les politiques publiques d’emploi et de formation professionnelle.
Les enseignements de l’évaluation
Dans un contexte où les besoins de recrutement sont forts mais où de nombreux candidats peinent à intégrer durablement l’emploi, le module « Sport & Performance » développé par Pass’Sport pour l’Emploi apporte une réponse innovante : utiliser les valeurs, les codes et les situations du sport pour révéler, renforcer et transférer les compétences transversales indispensables à la réussite professionnelle. L’évaluation indépendante du module confirme la pertinence et l’efficacité de cette approche. Elle démontre surtout que le socio-sport, lorsqu’il est structuré, contextualisé et co-construit avec les employeurs, devient un formidable levier de remobilisation, de montée en compétences et d’accès à l’emploi durable.
Une association engagée : former autrement pour inclure durablement
Créée en 2017, Pass’Sport pour l’Emploi part d’une conviction simple : le sport est un révélateur de potentiel, un terrain exigeant mais bienveillant où chacun peut expérimenter l’effort, la cohésion, le dépassement, et reconstruire une estime de soi parfois abîmée par les ruptures scolaires, professionnelles ou personnelles.
Le module « Sport & Performance » repose sur trois piliers, adaptés au métier visé :
- Le mental : gestion du stress, gestion des conflits, confiance.
- Le professionnel : savoir-être, image de soi, communication, éloquence.
- Le physique : condition physique générale, prévention des TMS, self-défense, diététique.
L’objectif n’est pas seulement de « faire du sport », mais d’utiliser l’activité physique comme support pédagogique, comme situation d’apprentissage authentique où les comportements apparaissent, se travaillent et se transforment.
Il repose sur une philosophie particulière :
- Les valeurs du sport sont transposables au monde de l’entreprise.
- La pratique sportive est un levier d’inclusion sociale, un vecteur de santé, de bien-être et d’employabilité.
- Le module s’inspire de la préparation des athlètes de haut niveau pour soutenir l’entrée sur le marché du travail ou la réinsertion des personnes éloignées de l’emploi.
- La condition physique, les codes et les valeurs du sport deviennent ainsi des supports d’apprentissage.
L’association s’inscrit donc pleinement dans le champ du « socio-sport », une notion qui se diffuse largement sous l’impulsion du PRNS-I et du consortium Impact Social par le Sport. Plusieurs critères peuvent être retenus pour définir cette notion :
- La mobilisation d’activités sportives s’inscrit dans une ingénierie plus ambitieuse visant à s’en servir comme support pour d’autres objectifs éducatifs et sociaux.
- L’action cible les publics présentant des fragilités.
- L’action permet le développement de compétences transférables.
Un rôle clé : travailler les compétences transversales que la formation classique traite peu
Le rapport rappelle que les formations professionnelles traditionnelles se concentrent sur la technique et disposent rarement du temps nécessaire pour aborder la gestion des émotions, la posture professionnelle, la concentration, la résilience, la coopération, ou encore la capacité à agir sous stress.
Or, ces dimensions sont déterminantes dans les métiers ciblés : sécurité privée, transport, hôtellerie, service aux seniors, sûreté ferroviaire…
Le module permet précisément de :
- mettre les apprenants en situation, dans des contextes qui reproduisent l’intensité, la fatigue ou la pression rencontrées en emploi ;
- objectiver les compétences, grâce au référentiel Evacops® et à une cartographie structurée des « soft skills » ;
- favoriser la prise de conscience, à travers un accompagnement individuel et collectif tout au long du parcours ;
- ancrer durablement les acquis, en reliant systématiquement situations sportives et exigences métier.
Les entreprises, interrogées dans le cadre de l’évaluation, soulignent que ces compétences sont souvent le point faible des candidats « classiques », et que le module prépare mieux aux réalités du terrain que bien des dispositifs existants.
Une pédagogie qui transforme : mise en action, intensité progressive et accompagnement serré
L’évaluation détaille la richesse des mises en situation proposées : jeux de coordination, footing, renforcement, randonnées, jeux de rôle en mouvement, épreuves proches des tests de recrutement, ateliers de cohésion…
Cette mise en action poursuit trois objectifs :
- Remettre en mouvement le corps, particulièrement pour des publics très sédentaires ou éloignés du sport. Certains stagiaires perdent 5 à 10 kilos durant la formation.
- Révéler les comportements : réactions au stress, rapport à la règle, persévérance, coopération, gestion de la frustration.
- Créer un point de bascule : autour de la deuxième semaine, la fatigue fait émerger « le vrai ». L’équipe pédagogique peut alors accompagner des prises de conscience profondes et durables.
Cette approche intensive mais bienveillante repose sur une équipe de formateurs engagés, issus du sport de haut niveau, du coaching, du socio-sport ou de la prévention des risques professionnels.
Un modèle partenarial unique : chaque formation implique le futur recruteur et correspond à un poste garanti
La grande singularité du module Sport & Performance réside dans son lien étroit avec les employeurs. Chaque session est menée en partenariat avec une entreprise qui s’engage à recruter les apprenants à l’issue du parcours, sous réserve de réussite aux tests ou certifications.
Les partenaires mobilisés (RATP, GORON, Domitys, Accor, Nouvel’R…) sont impliqués à toutes les étapes :
- sélection : présence en réunion collective, entretien individuel, observation des candidats en situation sportive ;
- construction des contenus : adaptation du module aux exigences métier (ex. TRSM pour les machinistes) ;
- suivi : retours réguliers, ajustements, visites d’entreprise ;
- recrutement : test final, validation des candidatures, intégration.
Ce modèle garantit une adéquation fine entre compétences développées et besoins des recruteurs. Il favorise aussi la motivation des apprenants, qui savent qu’un poste les attend réellement.
L’évaluation met en évidence des résultats solides :
- Une satisfaction très élevée
Les questionnaires à chaud (102 répondants) affichent une moyenne systématiquement supérieure à 9/10, et un taux de recommandation de 95 %.
La parole des parties prenantes (financeurs, recruteurs, prescripteurs, stagiaires) converge également et témoigne d’une satisfaction et d’une utilité ressentie très élevée (cf verbatims).
- Une montée en compétences transversales visible et mesurable
Les stagiaires identifient clairement ce qu’ils ont développé : confiance, gestion du stress, discipline, communication, endurance, capacité à coopérer…
Plusieurs mois après la formation, beaucoup évoquent l’utilisation quotidienne de ces acquis :
« On retrouve les valeurs du sport dans le travail : la résilience, l’effort, la confiance. »
- Une insertion professionnelle facilitée
Le module :
- prépare aux tests et certifications (TRSM, permis D+FIMO, CQP APS, CQP Réceptionniste…) ;
- améliore l’aptitude physique et mentale aux métiers en tension ;
- sécurise la prise de poste grâce à un travail sur la posture, la gestion des situations stressantes, la prévention des risques.
- Un maintien en emploi renforcé
Les employeurs soulignent que les apprenants issus du module sont mieux préparés à :
- supporter la pression du terrain ;
- s’adapter rapidement ;
- demander de l’aide en cas de difficulté ;
- gérer fatigue et imprévus.
Des limites et leviers d’amélioration identifiés
L’évaluation reconnaît l’efficacité du module, mais propose trois axes de progression :
- Renforcer l’animation du collectif des formateurs
Limités par les enveloppes disponibles pour chaque formation dans lesquelles ils interviennent et isolés par leur statut d’auto-entrepreneurs, ils gagneraient à disposer de temps dédiés (en complément du face-à-face pédagogique) pour partager leurs pratiques, retours d’expérience, et aller plus loin dans la coordination du suivi pédagogique entre les matières. En l’état, c’est le fort attachement à l’association et les relations professionnelles de très bonne qualité entre les formateurs et l’association qui permet de les solliciter sur ces questions, mais de manière réduite et limitée par leurs disponibilités et leur engagement.
- Renforcer le processus d’accompagnement à la transférabilité des compétences et soutenir la politique d’intégration des entreprises partenaires.
Certains stagiaires comprennent très bien le lien entre sport et emploi ; d’autres moins. Un accompagnement plus systématique aiderait à sécuriser encore davantage les parcours et la mobilisation futures des compétences développées dans le module.
D’autre part, en dépit de l’implication des entreprises tout au long du module « Sport et Performance » et du fait que l’association permet à des publics fragiles de compenser leurs difficultés initiales pour se positionner en candidats capables de rivaliser avec des candidats « classiques », il n’en reste pas moins que ses publics présentent des signes de fragilités. Quel que soit le niveau de leur motivation à la prise de poste, on peut faire l’hypothèse que, pour différentes raisons inhérentes à leur parcours de vie, ces publics présentent une sensibilité accrue à des situations de stress ou de tension pouvant entraîner des absences voire une rupture du contrat. Un accompagnement conjoint Pass’Sport pour l’Emploi / entreprises renforcerait le maintien durable dans l’emploi. Dans le même temps, quels que soient les résultats de l’évaluation réalisée en fin de formation, les compétences des apprenants observées à l’instant T sont certes le reflet de leur potentiel mais elles sont également à mettre en perspective avec les conditions particulières dans lesquelles elles se sont manifestées. Dit autrement, la transférabilité de leurs compétences au sein de l’entreprise accueillante n’a rien d’automatique. Elle dépend de plusieurs conditions qui questionnent à la fois l’ingénierie pédagogique mise en oeuvre par l’association Pass’Sport mais aussi le parcours d’intégration et l’encadrement chez le nouvel employeur. Ainsi, il ne peut y avoir de transférabilité des compétences déconnectée d’un parcours d’intégration structuré et de la mise en place d’un tutorat. Ces actions internes à l’entreprise accueillante semblent d’autant plus pertinentes qu’il est question de publics fragiles pouvant « décrocher » facilement.
- Repenser la communication sur le module « Sport et Performance » et valoriser le caractère universel de ses apports.
Les investigations montrent combien il serait aisé de réduire le module « Sport et Performance » à ses activités sportives et combien le lien avec les publics en situation de vulnérabilité peut s’avérer vite enfermant par rapport au potentiel des activités déployées. En effet, il apparaît que les apports du module peuvent adresser d’autres publics dans un marché de l’emploi qui positionne les compétences transversales (dénommées « savoir -être », « soft skills » ou compétences comportementales ») comme l’un des facteurs majeurs des difficultés de recrutement.
Aussi, et tout en confortant le développement d’activités de formation en direction de publics fragiles, il semblerait tout indiqué de décliner le module « Sport et Performance » en direction d’autres publics cibles comme les jeunes en lycée professionnel, en apprentissage ou bien en formations supérieures.
Un enseignement fort : le socio-sport, quand il est structuré, change la donne
Ce rapport montre que le module « Sport & Performance » ne se limite pas à remobiliser des personnes éloignées de l’emploi.
Il renouvelle en profondeur la manière de penser la formation professionnelle, en intégrant :
- la prévention des risques,
- la santé,
- les soft skills,
- la cohésion,
- la motivation,
- la connaissance de soi,
- et la préparation physique et mentale au métier.
Autant de dimensions essentielles, mais rarement travaillées conjointement dans les dispositifs classiques.
Conclusion : un modèle à consolider et à essaimer
L’évaluation confirme que Pass’Sport pour l’Emploi a développé un modèle original, cohérent et efficace. Il apporte une réponse concrète aux défis actuels : pénurie de main-d’œuvre dans les métiers en tension, fragilités des publics en insertion, difficultés de maintien dans l’emploi.
En articulant sport, pédagogie active, accompagnement individuel et partenariat étroit avec les entreprises, le module « Sport & Performance » contribue à ouvrir des perspectives professionnelles durables pour des centaines de personnes. Pour autant, il ne s’agit pas d’essaimer le modèle de manière industrielle et « hors-sol », rappelons que sa réussite tient à l’articulation et l’hybridation personnalisées entre l’association et l’entreprise recruteuse.
Pour aller plus loin : lire le rapport complet permettra d’explorer plus en détail la méthodologie, les analyses qualitatives, les verbatims des personnes interrogées, les données quantitatives et les préconisations proposées.
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